The Dead Mauriacs – Un rêve pour Jacques Monory


À bord du Nil Bleu, les tueurs sont vêtus de spencers céruléens et chaussés de suédine. Là, les crosses de nacres sont pour les hommes à fine moustache, miroirs trompeurs de fantasmes figés. La nuit, les insectes mécaniques aux élytres iridescents d’hémocyanine accompagnent par phases étudiées, les pas las des opiomanes aux cernes prussiques. On s’identifie aux fumées gitanes et on échange à l’abri des regards étendus sur les steamers du pont promenade. Tout à l’heure des lèvres cyanosées aspireront les effluves de la précieuse pâte et se pâmeront des obsédantes stridulations des dendrobates azuréens. Dans cette nuit américaine, les insectes sans affect ne cesseront pas et leurs moiteurs sonores couvriront les râles alcaloïdes d’un herpétologiste au visage déjà turquin qui sera débarqué demain sous couvert d’un malaise léger. Un voile azuréen effacera son souvenir dissout par de longs Blue Monday frappés. Un regard plus appuyé, un sourire discret, un toast porté, scelleront la fin du contrat. On ne dira rien. Il ne se sera rien passé et les pas glisseront le soir revenu le long des steamers portés par le chant suave des petits batraciens assassins et des insectes programmés. Dans les nuits électrifiées, les crosses de nacre aux éclats méthylènes ne sont plus que des diversions et se portent en inoffensifs bijoux apaches.

28-30 juin 2017

— The Dead Mauriacs, texte et musique pour Extraits de bleu, le 8 septembre 2017, L’Espace d’en bas, Paris. Un programme de Collection Morel. Le morceau est également sur Bandcamp !